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M. Jean-Dominique SENARD

M. Jean-Dominique SENARD (Articles de presse associés à la biographie)

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Correspondance économique M. Jean-Dominique SENARD devrait être reconduit à la présidence du conseil d'administration de Renault

Correspondance économique - Date de parution : 16/12/2022

Le conseil d'administration de Renault va proposer le renouvellement pour quatre ans du mandat de président de M. Jean-Dominique SENARD, 69 ans, lors de l'assemblée générale du 11 mai 2023. M. SENARD, ancien président de la gérance de Michelin, avait été élu en janvier 2019 en remplacement de M. Carlos GHOSN, alors détenu au Japon. Il a depuis supervisé le virage de Renault vers l'électrique et le haut de gamme, et l'évolution des relations avec son partenaire Nissan.

Il sera également proposé lors de cette même assemblée la nomination comme administrateur du directeur général du groupe Luca de MEO, ainsi que le renouvellement du mandat de Mme Annette WINKLER, présidente du comité de la stratégie et du développement durable.

Correspondance économique M. Jean-Dominique SENARD, président du conseil d'administration de Renault, estime vitale la consolidation à court terme du secteur automobile, "notamment européen"

Correspondance économique - Date de parution : 25/09/2019

"Nous vivons actuellement un moment de rupture majeure dans notre industrie", a expliqué hier M. Jean-Dominique SENARD, président de Renault, devant la commission des Affaires économiques du Sénat. "Je n'ai jamais connu une période avec autant de secousses dans le monde de l'automobile, avec des alliances qui se créent partout dans le monde, une multiplication des partenariats pour gagner en efficacité". Le dirigeant a évoqué des "défis technologiques considérables", sur fond de transition énergétique touchant de plein fouet la mobilité, et d'essor de l'économie circulaire.

"Notre seule certitude est que tout change", a renchéri le directeur général de Renault Thierry BOLLORE. Dans ce nouveau paysage, le constructeur veut réinventer son modèle économique en devenant aussi "une entreprise de software et de services de mobilité", a expliqué l'industriel, soulignant que Renault est d'ores et déjà, via sa filiale Karhoo, "le premier agrégateur mondial d'offre de taxis et de VTC" (avec 2 millions de chauffeurs concernés dans le monde et 750 000 courses par jour). "On devient véritablement une entreprise de tech", a expliqué M. BOLLORE aux sénateurs.

Au sujet de la très chahutée alliance avec Nissan, M. SENARD a dit ne pas pouvoir imaginer l'avenir de Renault sans elle. "Au bout de vingt ans, elle nécessite peut-être un second souffle", a-t-il admis. "J'entends que nous ayons une efficacité redoublée dans les années qui viennent. Le potentiel est considérable et il n'est pas utilisé à son optimum, c'est le moins qu'on puisse dire". Mais le président de Renault (et du conseil opérationnel de l'Alliance) estime que tous les éléments sont réunis "pour aller plus loin et plus fort". Ainsi, "100 % des modèles que nous allons produire d'ici 2022 le seront via des plates-formes communes entre Renault et Nissan", a affirmé M. BOLLORE. Idem pour "toute la nouvelle génération de modèles électriques que nous allons lancer".

En matière de compétitivité, le directeur général de Renault a insisté sur les "efforts considérables" du constructeur pour maintenir une présence industrielle en France. "Nous avons recruté 5 500 personnes dans le pays depuis janviers 2017, au-delà de nos engagements", a-t-il fait valoir. Mais "les coûts de production restent élevés. Entre un opérateur en France et un opérateur en Espagne, il y a un écart de 40 %". M. BOLLORE a notamment profité de l'audition pour redire l'importance du Crédit d'impôt recherche (CIR) pour son groupe. "Le coût chargé de la R&D en France est le deuxième plus élevé au monde derrière les Etats-Unis", a-t-il souligné. "Le CIR permet de le baisser et faciliter nos dépenses de R&D en France, qui se sont élevées à plus de 3 milliards d'euros l'an dernier". De même, l'aide du gouvernement est plus que nécessaire pour secourir une filière diesel "en très grande souffrance", n'a-t-il pas caché. "Mais il ne sera pas suffisant, nous aurons besoin des collectivités locales pour l'identification, l'accompagnement et la conversion des fournisseurs qui sont impactés par les nouvelles normes d'émission de C02."

La fusion Renault-FCA, un projet "fondamentalement industriel" mais plus d'actualité

Interrogé sur le rapprochement avorté avec Fiat Chrysler (FCA) plus tôt dans l'année, M. SENARD a réaffirmé que "ce sujet est désormais derrière nous". Mais il a néanmoins fermement rejeté l'idée selon laquelle il se serait agi d'une opération capitalistique. "C'était précisément l'inverse", a-t-il martelé, évoquant "un projet fondamentalement industriel", lequel avait pour principal mérite de "mettre en avant les technologies de Renault". "Si une population pouvait profiter de cela c'était précisément les salariés du groupe. Ils voyaient leur avenir incroyablement plus assuré dans ce cadre que sans."

Et de mettre en garde : "face à l'automobile chinoise qui va devenir un des principaux acteurs mondiaux, si on ne regarde pas les choses en face, dans les cinq ans qui viennent nous devrons nous reprocher de ne pas avoir assuré notre devoir d'anticipation". M. SENARD a ainsi fait part aux sénateurs de son expérience en tant que président de la gérance de Michelin, durant laquelle il a vu la part de marché des pneumatiques chinois passer en Europe de "5 à 30 % en cinq ans". Le même cas de figure se présente aujourd'hui pour l'automobile, a-t-il prévenu. "Les voitures chinoises sont au point, elles sont connectées, parfois même mieux que les nôtres. Alors essayons de nous projeter. Si on ne procède pas au regroupement de nos unités, notamment européennes, nous n'aurons que nos yeux pour pleurer dans quelques années."

De même un mariage avec Fiat Chrysler aurait été "un élément de renforcement de l'alliance Renault-Nissan et non pas l'inverse", a estimé M. SENARD, "car il aurait apporté ce caractère mondial qui lui fait encore un peu défaut". "Si un jour le projet devait revenir sous une forme convenant à tous j'en serai ravi, mais ce n'est pas à l'ordre du jour", a-t-il conclu sur ce point.

Par ailleurs interrogé sur la question de l'hydrogène, M. SENARD a appelé de ses veux l'émergence d'"une filière européenne". Aujourd'hui, "il n'y a pas de projet en la matière, tout juste des projets nationaux, notamment en France et en Allemagne. Chez Renault nous sommes en vieille technologique attentive pour ne pas rater le coche". Un coche qui n'arrivera selon l'industriel que "lorsque l'hydrogène sera décarboné, car aujourd'hui il est majoritairement issu du craquage du gaz, ce qui lui enlève un gros argument stratégique". De même "le coût des stations de recharge reste encore trop excessif" pour être déployé à grande échelle, a-t-il estimé, tout en concédant qu'il s'agissait surement de "l'une des voies de mobilité de l'avenir".

Correspondance économique Les recommandations du rapport de Mme Nicole NOTAT et M. Jean-Dominique SENARD sur "l'entreprise, objet d'intérêt collectif"

Correspondance économique - Date de parution : 12/03/2018

Mme Nicole NOTAT, présidente de Vigeo-Eiris, ancienne secrétaire générale de la CFDT, et M. Jean-Dominique SENARD, président du groupe Michelin, ont remis vendredi un rapport intitulé "L'entreprise, objet d'intérêt collectif", au ministre de l'Economie et des Finances Bruno LE MAIRE, à la ministre de la Justice Nicole BELLOUBET, à la ministre du Travail Muriel PENICAUD et au ministre de la Transition écologique Nicolas HULOT (cf. supra). Voici la synthèse de ce rapport

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"Un constat : le court-termisme et la financiarisation pèsent sur la vie de l'entreprise

Les auditions ont confirmé le besoin d'une réflexion sur l'entreprise, dans un contexte de financiarisation de l'économie et de court-termisme de certains investisseurs. Le détenteur provisoire de capital n'a plus grand-chose à voir avec la figure de l'associé, visé par le Code civil de 1804. Ces témoignages étaient souvent replacés dans une perspective historique de notre continent. L'économie européenne s'est illustrée par un caractère "social" et "responsable", selon les observateurs. Dans ce modèle économique institutionnel et intermédié, l'entreprise tient une place importante. En France, les Caisses d'Epargne, "organismes privés d'utilité publique", les mutuelles et les coopératives sont quelques exemples de l'ancienneté de cette réflexion sur la poursuite par l'entreprise d'un intérêt collectif, réflexion qui ne se réduit pas à ces statuts.

A ce modèle économique d'Europe continentale est souvent opposé le capitalisme anglo-saxon, désintermédié et financiarisé, qui donne une place plus centrale au rôle du marché, ainsi que le capitalisme autoritaire qui émerge dans certains pays. Les "responsabilités fiduciaires" des dirigeants en droit américain sont ainsi interprétées par la plupart des juristes comme incitant à maximiser la valeur du capital pour les actionnaires.

Bien que cette obligation n'existe pas en droit français, la présence de fonds anglo-saxons au capital des entreprises françaises, le "benchmark" systématique de leurs performances financières avec celles d'entreprises soumises à ces exigences de maximisation, et le recours aux bonus en fonction de critères principalement financiers ont renforcé, de l'avis des personnes auditionnées, une certaine "dictature" du court-terme et des résultats financiers, une "prise du pouvoir par les actionnaires" à partir des années 1980. Depuis la crise de 2008, le rôle croissant consenti aux financiers "activistes" ainsi que le trading à haute fréquence sont des tendances nouvelles qui ont renforcé cette perception.

Une conviction : l'entreprise a une raison d'être et contribue à un intérêt collectif

Le rôle premier de l'entreprise n'est pas la poursuite de l'intérêt général, mais des attentes croissantes à l'égard des entreprises sont régulièrement exprimées, avec l'essor des défis environnementaux et sociaux. Le concept de "parties prenantes" - c'est-à-dire les personnes et les groupes qui subissent un risque du fait de l'activité de l'entreprise - est fréquemment évoqué pour susciter une prise de conscience par l'entreprise des impacts de son activité. Au-delà de ces tiers prenant part à l'entreprise, la conviction portée par ce rapport est que le gouvernement d'entreprise lui-même doit incorporer ces considérations dans sa stratégie. Il convient pour cela que chaque entreprise prenne conscience de sa "raison d'être".

Une entreprise se crée seulement si elle répond à un besoin spécifique et elle perdure seulement si elle maintient une dynamique d'invention, d'innovation et de création collective. Elle contribue à un ensemble économique et social, en constituant un réseau de clients, de fournisseurs ou de sous-traitants, en s'insérant dans un écosystème, etc.

Chaque entreprise a donc une raison d'être non réductible au profit. C'est d'ailleurs souvent lorsqu'elle la perd que les soucis financiers surviennent. De même que la lettre schématise l'esprit, le chiffre comptable n'est qu'un révélateur d'une vitalité de l'entreprise qui se joue ailleurs. La raison d'être se définit comme ce qui est indispensable pour remplir l'objet social, c'est-à-dire le champ des activités de l'entreprise. Elle est à l'entreprise ce que l'affectio societatis, bien connu des juristes, est aux associés : une volonté réelle et partagée. Si quelques-uns pourraient être tentés d'en faire un objet marketing, la raison d'être fournira à la plupart des conseils d'administration un guide pour les décisions importantes, un contrepoint utile au critère financier de court-terme, qui ne peut servir de boussole.

Les entreprises considèrent déjà leurs enjeux sociaux et environnementaux

La France compte en Europe et au niveau mondial, parmi les pays pionniers de la responsabilité sociale et environnementale des entreprises (RSE). La démarche RSE exprime une ambition : celle de voir le gouvernement des entreprises intégrer dans ses réflexions et ses décisions les conséquences que ses activités font peser sur l'environnement et les droits fondamentaux. Dès 2001, la loi sur les nouvelles régulations économiques (NRE) demandait à l'ensemble des sociétés cotées de publier dans leur rapport de gestion annuel des informations sociales et environnementales. Cette impulsion a été approfondie et étendue par la loi "Grenelle II" du 12 juillet 2010, si bien que les sociétés françaises sont aujourd'hui parmi les plus transparentes au monde en la matière. Cette combinaison de comportements volontaires, de transparence organisée et de "name and shame" (dénoncer et blâmer), devait entraîner toutes les entreprises. Ces développements depuis quinze ans ont contribué à une évolution favorable de la relation entre l'entreprise et la société française. Les citoyens ont commencé à y voir un plus grand engagement de la part des entreprises et les chefs d'entreprises, un élément de compétitivité durable.

L'image de l'entreprise est dépréciée par rapport à ce qu'elle pourrait être

L'entreprise est vue comme faisant partie des problèmes sociaux et environnementaux posés à nos contemporains. La lecture de la presse et la consultation de sondages suffisent à s'en convaincre. Une récente enquête rappelle le chemin à parcourir : interrogés sur les mots qui caractérisent le mieux leur état d'esprit vis-à-vis des entreprises, les Français sondés citent la méfiance, qui arrive en tête. Cette méfiance risque de durer tant que la représentation officielle figurera une entreprise libre et irresponsable au sein de l'espace de légalité défini par la puissance publique. La RSE reste ainsi parfois considérée comme un affichage, un supplément d'âme, ou un exercice formel de conformité à une grille de questions.

Pourtant les nombreuses attentes qui s'expriment à l'égard de l'entreprise montrent que cette image n'est pas définitive et ne peut que s'améliorer, à mesure des engagements. Ces attentes expriment une aspiration à placer la RSE au ceur de la stratégie de l'entreprise, et au ceur du droit des sociétés. Dans un pays et un continent de droit civiliste, dans lequel la source principale du droit est la loi et non la jurisprudence, la modification de la loi est centrale et est pourvue d'une force symbolique, ce qui explique une telle demande.

Un droit des sociétés perçu comme décalé avec la réalité des entreprises et des attentes

L'idée est apparue à partir de 2009 que la définition de la société dans le Code civil et son objet social, devaient être modifiés pour donner à l'entreprise une substance non réductible au profit. La rédaction de ces articles remontant, sauf ajustements accessoires, à 1804, elle a pu paraître décalée à certains. Le Code civil ne peut évidemment être tenu responsable de comportements de maximisation du profit, mais la véritable question est plutôt de savoir si ce texte pourrait prévenir et limiter de telles conduites dommageables. La société anonyme a été "le merveilleux instrument du capitalisme". La société anonyme de 1807, autorisée par décret en Conseil d'Etat, n'a cependant plus grand-chose à voir avec la grande société cotée, dotée de sociétés filiales à l'étranger et à la tête d'un groupe composé, même en France, de montages juridiques nécessitant une multitude de sociétés. L'industrialisation et l'internationalisation sont passées par là. Le contrat de louage de service a cédé sa place au contrat de travail. Le travail n'est plus traité comme une fourniture parmi d'autres. Il existe depuis la fin du XIXe siècle une relation de subordination qui ne correspond plus aux canons de l'égalité des parties contractantes du Code civil, et a donné lieu au Code du travail à partir du début du XXe siècle. L'entreprise comme institution est alors née et elle ne se réduit pas à une somme de contrats, à une confrontation d'offre et de demande. Et pourtant les articles du Code civil sont demeurés tels quels, si bien que l'entreprise serait pour certains "prisonnière" de la société commerciale.

L'entreprise et son droit, une partie de la solution

L'entreprise constitue une partie de la solution, c'est la conviction portée par le présent rapport. Redonner de la substance à l'entreprise, l'amener à réfléchir à sa raison d'être est dans notre esprit le moyen d'amener la grande entreprise à faire à une échelle mondiale ce que la petite fait souvent, du fait de son insertion dans un territoire et dans un contexte de fort intuitu personae. Si l'Economie sociale et solidaire (ESS) a constitué une "troisième voie" entre l'action publique et l'économie de marché, il semble qu'une autre voie puisse se dessiner, celle d'une économie responsable, parvenant à concilier le but lucratif et la prise en compte des impacts sociaux et environnementaux.

Les attentes de nos contemporains, l'héritage d'une conception européenne de l'entreprise et la comparaison avec nos partenaires anglo-saxons, qui ont eux-mêmes pris conscience des défis posés à l'entreprise, alors qu'elle correspond moins à leur propre modèle, tout cela nous conduit à penser que le statu quo n'est plus possible aujourd'hui et qu'il convient de consacrer dans notre droit la dynamique de la responsabilité sociale des entreprises. Cette voie doit être empruntée par les entreprises dans leur ensemble, à des rythmes cependant différents. Il s'agit donc à la fois de proposer une évolution normative légère pour toutes, et d'offrir des options pour que les entreprises à la recherche d'une exemplarité dans ce domaine puissent aller plus loin.

Cinq recommandations d'ordre législatif

Recommandation n°1 : ajouter un second alinéa à l'article 1833 du Code civil : "[...] La société doit être gérée dans son intérêt propre, en considérant les enjeux sociaux et environnementaux de son activité." Aucune société, même une société civile immobilière, ne peut faire complètement abstraction des enjeux sociaux et environnementaux de son activité. Cette écriture consacre un mouvement enclenché par les entreprises elles-mêmes. La référence à l'intérêt propre clarifie les interprétations de l'intérêt social : il ne peut se réduire aux intérêts particuliers des associés.

Recommandation n°2 : confier aux conseils d'administration et de surveillance la formulation d'une "raison d'être" visant à guider la stratégie de l'entreprise en considération de ses enjeux sociaux et environnementaux. L'article L225-35 du Code de commerce serait ainsi complété des mots soulignés : "Le conseil d'administration détermine les orientations de l'activité de la société en référence à la raison d'être de l'entreprise, et veille à leur mise en euvre, conformément à l'article 1833 du Code civil". Cette rédaction devra être déclinée pour les conseils de surveillance, les mutuelles, les coopératives, les SAS dotées d'un conseil, etc.

La raison d'être exprime ce qui est indispensable pour remplir l'objet de la société. Cet "objet social" étant devenu un inventaire technique, il est nécessaire de ramasser en une formule ce qui donne du sens, à l'objet collectif qu'est l'entreprise. C'est un guide pour déterminer les orientations stratégiques de l'entreprise et les actions qui en découlent. Une stratégie vise une performance financière mais ne peut s'y limiter. La notion de raison d'être constitue en fait un retour de l'objet social au sens premier du terme, celui des débuts de la société anonyme, quand cet objet était d'intérêt public. De même qu'elle est dotée d'une volonté propre et d'un intérêt propre distinct de celui de ses associés, l'entreprise a une raison d'être.

Recommandation n°6 : renforcer le nombre des administrateurs salariés dans les conseils d'administration ou de surveillance de plus de 1000 salariés partir de 2019, à deux salariés à partir de 8 administrateurs non-salariés et trois salariés à partir de 13 administrateurs non-salariés. Cette rédaction devra être déclinée dans les mutuelles, et si possible aux SAS dotées d'un conseil.

Les salariés dans ces conseils apportent une contribution précieuse par leur compréhension de l'intérieur, leur connaissance des métiers, de l'histoire de l'entreprise et par leur attachement à sa continuité. La recherche économique montre que cette présence a un impact positif sur l'innovation. Les salariés doivent également être reconnus comme partie constituante de l'entreprise, car ils investissent dans l'entreprise par leur travail et subissent les risques de son activité.

Recommandation n°7 : faire le point sur la représentation des salariés dans les conseils par une mission tirant les enseignements de 12 ou 24 mois de pratique, avant d'envisager de l'étendre aux sociétés de 500 à 1000 salariés, ou d'augmenter la proportion des administrateurs salariés aux conseils.

18 des 28 pays de l'Union européenne prévoient une proportion d'administrateurs salariés, en général de 33 %. La règle en France pourrait donc à terme évoluer vers une proportion. Les seuils sont également plus faibles dans le reste de l'Europe (500 salariés en Allemagne, moins d'une centaine dans plusieurs pays).

Recommandation n°8 : doter les sociétés par actions simplifiée (SAS) de plus de 5000 salariés d'un conseil d'administration ou de surveillance régis par les dispositions applicables aux sociétés anonymes, afin qu'ils disposent des mêmes proportions d'administrateurs salariés. La société par actions simplifiée peut être unipersonnelle. Mais lorsqu'elle est une grande entreprise de plus de 5000 salariés, il ne doit pas exister de différence de traitement et elle doit aussi se doter d'administrateurs salariés.

Trois recommandations concernant des cadres juridiques optionnels

Recommandation n°11 : confirmer à l'article 1835 du Code civil la possibilité de faire figurer une "raison d'être" dans les statuts d'une société, quelle que soit sa forme juridique, notamment pour permettre les entreprises à mission. Un deuxième alinéa serait ainsi adjoint : "L'objet social peut préciser la raison d'être de l'entreprise constituée."

Si les organes de délibération collective de toute société commerciale doivent se prononcer sur la raison d'être de l'entreprise, il n'est pas obligatoire de la faire figurer dans les statuts. Il s'agit d'une option ouverte à celles voulant devenir "entreprise à mission".

Recommandation n°12 : reconnaître dans la loi l'entreprise à mission, accessible à toutes les formes juridiques de société, à la condition de remplir quatre critères.

Ces critères sont : (1) l'inscription de la raison d'être de l'entreprise dans ses statuts ; (2) l'existence d'un comité d'impact doté de moyens, éventuellement composé de parties prenantes ; (3) la mesure par un tiers et la reddition publique par les organes de gouvernance du respect de la raison d'être inscrite dans les statuts ; (4) la publication d'une déclaration de performance extra-financière comme les sociétés de plus de 500 salariés.

Recommandation n°14 : assouplir la détention de parts sociales majoritaires par les fondations, sans en dénaturer l'esprit, et envisager la création de fonds de transmission et de pérennisation des entreprises.

Le terme de fondation et la fiscalité afférente doivent être réservés aux missions philanthropiques et d'intérêt général. Ces fondations peuvent depuis 2005 détenir la majorité des parts d'une entreprise sans intervenir dans sa gestion. Le développement de ces montages doit être facilité. Le fonds de transmission et de pérennisation vise les fondateurs d'entreprises qui souhaitent pérenniser une raison d'être ou une implantation territoriale, sans vocation philanthropique.

Six recommandations à l'attention des praticiens et des administrations

Recommandation n°3 : accompagner le développement de labels RSE sectoriels et de faire de la RSE un outil de renforcement du dialogue social dans les branches professionnelles.

De nombreuses PME souhaitent s'engager en matière de RSE, et demandent parfois une voie à suivre. Les bonnes pratiques et leur mesure variant considérablement d'un secteur à l'autre, le dialogue social dans les branches et les labels sectoriels constituent une voie à la fois réaliste, crédible et valorisante.

Recommandation n°4 : (i) inciter les grandes entreprises à se doter à l'initiative des dirigeants d'un comité de parties prenantes, indépendant du conseil d'administration. Le conseil d'administration est informé par les dirigeants des réflexions et des éventuelles conclusions de ce comité. (ii) Intégrer la stratégie RSE dans les attributions de l'un des comités ou d'un comité ad hoc du conseil d'administration. Ces deux bonnes pratiques pourraient figurer dans les codes de gouvernance.

Plusieurs entreprises ont mis en place des comités de parties prenantes, qui fournissent alors aux dirigeants une prise de recul, une vision complémentaire sur les activités de l'entreprise, ainsi qu'un aiguillon de progrès en matière de RSE.

Recommandation n°5 : développer les critères RSE dans les rémunérations variables des dirigeants.

Les critères de la rémunération variable des dirigeants est un facteur décisif de conduite du changement. Le développement des critères RSE constitue donc une bonne pratique déjà répandue dans le CAC 40 et qui gagnerait à être diffusée.

Recommandation n°9 : engager une étude sur le comportement responsable de l'actionnaire, dans la continuité de la réflexion enclenchée sur l'entreprise.

Il n'y a pas d'entreprise responsable sans investisseur responsable. Le rapport du groupe de travail européen sur la finance durable ouvre des pistes intéressantes. Dans la continuité de la réflexion sur l'entreprise, une étude pourrait également être lancée sur le rôle de l'actionnaire et certaines pratiques, comme le prêt d'actions.

Recommandation n°10 : engager une étude concertée sur les conditions auxquelles les normes comptables doivent répondre pour servir l'intérêt général et la considération des enjeux sociaux et environnementaux.

Toute compréhension de l'entreprise passe par sa comptabilité. Or les enjeux sociaux et environnementaux qui doivent être considérés, en sont absents. De même que le droit des sociétés a pu apparaître décalé avec la réalité, la comptabilité strictement financière ne donne pas une image fidèle de la pratique des entreprises. Une étude pourrait donc être engagée sur ce sujet.

Recommandation n°13 : envisager la création d'un acteur européen de labellisation, adapté aux spécificités du continent européen, pour labelliser les entreprises à mission européennes.

L'élaboration des normes est un élément de soft power. Dans le cadre des réflexions sur l'influence normative, la France et l'Europe doivent développer leur propre vision et leurs propres normes de droit souple devant guider les entreprises à mission en Europe.

Correspondance économique Election à la présidence du Medef : le conseil exécutif refuse une évolution des statuts, fermant la porte à une candidature du président de Michelin Jean-Dominique SENARD

Correspondance économique - Date de parution : 12/12/2017

Le conseil exécutif du Medef a fermé la porte hier à une candidature de M. Jean-Dominique SENARD, président de Michelin, à la succession de M. Pierre GATTAZ, en juillet prochain.

M. SENARD n'avait pas fait mystère de son souhait d'être candidat à une élection où il aurait fait figure de grand favori. Problème, malgré de très nombreux soutiens, sa candidature butait depuis de longues semaines sur la limite d'âge pour être candidat. L'article 16 des statuts du Medef prévoit en effet que "les candidats à la présidence ne doivent pas être âgés de plus de 65 ans au jour de l'élection". Or M. SENARD aura 65 ans le 7 mars prochain, plusieurs mois avant l'élection.

M. GATTAZ ayant écarté l'hypothèse d'une démission qui aurait permis d'avancer la date de l'élection, le débat s'est cristallisé autour de la possibilité d'une interprétation souple de la limite d'âge ou d'une modification des statuts, afin de permettre à M. SENARD de pouvoir être candidat.

Après avoir reçu un avis consultatif du comité statutaire, M. GATTAZ a décidé, ainsi que nous l'annoncions (cf. CE du 06/12/2017), que le conseil exécutif trancherait cette question en procédant par vote à bulletins secrets.

Rappelons que le conseil exécutif est composé de 45 membres : M. Pierre GATTAZ, 22 représentants des fédérations et organisations professionnelles, 12 représentants des Medef territoriaux et 10 personnalités qualifiées.

Le vote a porté sur la question suivante : "Etes-vous favorable à ouvrir les candidatures à la présidence du Medef pour des candidats qui ont dépassé leur 65e anniversaire au jour de l'élection, notamment pour celle à venir de juillet 2018 ?". Le résultat de ce vote a été négatif, avec 30 voix contre et 15 pour. Il n'a donc pas été besoin de procéder à un second vote à bulletin secret, qui, en cas de réponse positive à la première question aurait porté sur la manière d'interpréter ou modifier les statuts.

Dans un communiqué transmis à l'AFP, M. SENARD a dit "prendre acte" de la décision du Medef, rappelant qu'il était lui-même "hostile à une modification ou à une interprétation de dernière minute" des statuts. "Je confirme donc que je ne serai pas candidat tout en poursuivant avec énergie mon engagement personnel au service des entreprises et de la transformation de notre pays", a-t-il ajouté.

Cette décision du conseil exécutif clôt donc le psychodrame autour de la candidature de M. SENARD et relance la donne en vue de l'élection de juillet prochain. Deux présidents de Medef territoriaux ont d'ores et déjà fait part de leur candidature : MM. Patrick MARTIN, président du Medef Auvergne-Rhône-Alpes (cf. CE du 06/12/2017) et Frédéric MOTTE, président du Medef Hauts-de-France, vice-président délégué du Medef, président du pôle branches, territoires et mandats (cf. CE du 07/12/2017). D'autres candidatures devraient être annoncées dans les prochaines semaines et les prochains mois. Les noms de MM. Alexandre SAUBOT, président de l'UIMM, vice-président du Medef en charge du pôle social et Geoffroy ROUX de BEZIEUX, vice-président délégué du Medef, en charge du pôle économie, sont particulièrement évoqués [...].


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